À travers la Cisjordanie, le paysage se transforme à une vitesse inédite depuis des décennies. Des communautés entières sont effacées sous l’effet d’une expansion coloniale systématique et de démolitions qui reproduisent la logique de la guerre génocidaire menée à Gaza. Rien n’est improvisé : il s’agit d’une stratégie calculée visant à reconfigurer le territoire, fragmenter sa géographie et affaiblir la vie palestinienne jusqu’à faire de la simple présence un acte de résistance.

Ces derniers mois, la croissance des colonies a atteint un rythme exceptionnel. Des dizaines de nouveaux avant-postes, souvent dissimulés sous l’étiquette de « zones de pâturage », ont émergé sur les collines, tandis que checkpoints et remblais militaires morcellent désormais la Cisjordanie en îlots isolés. Selon des observateurs locaux, près de la moitié du territoire se trouve aujourd’hui sous contrôle direct ou indirect d’Israël. Chaque démolition et chaque nouvelle barrière s’inscrivent dans une campagne d’annexion de facto, qui étend la domination territoriale sous couvert de “sécurité”.

La normalisation silencieuse de ces pratiques rend la situation particulièrement dangereuse. Des villages vidés de leurs habitants sont rapidement convertis en zones de colonisation ou en terrains d’entraînement militaire. Des camps, autrefois symboles de résilience, sont effacés physiquement ou coupés de leurs terres agricoles. Cette transformation, alertent les experts, vise à rendre l’autodétermination palestinienne géographiquement et socialement impossible.

Pour beaucoup, la Cisjordanie est devenue le laboratoire d’une nouvelle forme de contrôle, moins visible qu’une guerre ouverte mais tout aussi destructrice. Tandis que les gouvernements débattent de cessez-le-feu et de résolutions, les bulldozers redessinent l’avenir, colline après colline. Ici, la lutte ne porte pas seulement sur la terre, mais sur le droit d’exister, de cultiver, et de rester enraciné dans un espace méthodiquement démantelé sous le voile de l’impunité.