À Beit Dajan, à l'est de Naplouse, l’agriculteur Magdy Abu Jaish marche dans sa serre et montre des rangées de plants de tomates desséchés, réduits à l’état de débris fragiles. « Il ne reste plus une seule pousse verte… une seule étincelle pourrait tout embraser », dit-il, décrivant une dévastation causée non par la sécheresse, mais par la destruction délibérée des puits qui constituaient la ligne de vie du village.
Fin juillet, les forces d’occupation israéliennes ont envahi la zone et ont rempli deux puits artésiens de ciment, tout en confisquant les pompes et le matériel. L’un de ces puits, situé en zone B et officiellement autorisé par l’Autorité palestinienne, approvisionnait plus de 120 dunams de cultures de tomates. L’attaque a eu lieu en pleine saison des récoltes, anéantissant les moyens de subsistance et causant des pertes directes estimées à plus de deux millions de shekels. Près de 200 travailleurs ont perdu du jour au lendemain leur seule source de revenus.
Les agriculteurs de Beit Dajan et du village voisin de Beit Furik, dont beaucoup s’étaient tournés vers l’agriculture après avoir perdu leur emploi dans les territoires occupés, voient aujourd’hui leurs projets délibérément sabotés. « L’occupation est venue tuer la saison en asséchant les puits », explique Abu Jaish, qui avait investi toutes ses économies après son licenciement. Le coût des plants, des engrais, des systèmes d’irrigation et des serres a plongé les familles endettées.
Le sort de Yasser Abu Khder est tout aussi dramatique. Lui et ses sept frères avaient étendu leur exploitation à 10 dunams cette année, pour finalement voir l’intégralité de leur récolte de 45 tonnes de tomates réduite à néant. « Ce projet faisait vivre sept familles, dont des étudiants à l’université. Aujourd’hui, nous croulons sous une dette de 720 000 shekels », témoigne-t-il. Même l’eau d’urgence fournie par la municipalité de Naplouse s’est avérée insuffisante : à peine 1,5 tasse par dunam, loin des 8 tasses nécessaires quotidiennement.
Le président du conseil villageois de Beit Dajan, Nasr Abu Jaish, qualifie la fermeture des puits de « ciblage systématique, à la fois politique et militaire ». Il se souvient des paroles crues d’un officier d’occupation : « Nous ne voulons pas démolir nous-mêmes les serres ; nous voulons que vous les détruisiez de vos propres mains. »
Pour les agriculteurs de Beit Dajan, cette attaque ne vise pas seulement l’eau : elle cherche à anéantir l’agriculture palestinienne sur des terres convoitées par les colons. Sans compensation, avec des dettes qui s’accumulent et aucune source d’eau fiable, les familles assistent, impuissantes, à l’effondrement de leurs rêves. Elles se disent victimes d’une campagne organisée pour les déraciner de leur terre.
Source : Safa News