Vol de terre et d'identité à Masafer Yatta

Des colons armés, protégés par des soldats, se sont emparés de terres familiales à Masafer Yatta, dans le sud de la Cisjordanie occupée, effaçant en quelques jours l'héritage de plusieurs générations. Ce terrain, d'environ 50 acres de terres agricoles comptant plus de 500 oliviers, des vignes et des amandiers, appartenait au médecin palestino-américain Nidal Jboor. Sa famille a assisté, impuissante, à l'installation de tentes et d'enclos, à l'introduction de bétail et à une appropriation graduelle, le tout sous protection militaire. Cette confiscation s'inscrit dans un schéma bien établi où les terres palestiniennes sont d'abord occupées de fait, puis rétroactivement légitimées par les autorités d'occupation.

Pour Jboor, aujourd'hui installé aux États-Unis, le choc est à la fois juridique et profondément personnel. Ses parents, frères et sœurs restent sur place, contraints de voir des étrangers s'approprier ce qu'ils ont cultivé pendant des décennies. « Chaque olivier, chaque vigne fait partie de leur vie », déclare-t-il, partagé entre le chagrin et la crainte. Face à des colons lourdement armés et soutenus par l'armée, les familles se retrouvent sans défense, incapables de résister à l'effacement lent de leur présence sur cette terre.

Cette saisie intervient après des décennies de tentatives pour déclarer une grande partie de Masafer Yatta « zone militaire », entraînant démolitions et déplacements forcés de familles palestiniennes. Les activistes et les résidents affirment que cette politique sert moins à créer des zones d'entraînement qu'à ouvrir la voie à l'expansion des colonies. La récente mort de l'enseignant et activiste Awdah Hathleen, tué par un colon à quelques kilomètres de là, souligne les dangers auxquels les familles sont confrontées, alimentant la crainte que la même violence ne frappe les proches de Jboor.

Au-delà de la peur immédiate se trouve une blessure plus profonde : la cible délibérée que représente une terre qui incarne l'identité, la mémoire et les moyens de subsistance. La décision de Washington d'armer Israël avec des milliers de nouveaux fusils américains accroît les craintes que ces armes ne soient utilisées contre des civils palestiniens par des colons enhardis. Pour des familles comme les Jboor, la lutte ne porte plus seulement sur des droits juridiques, mais sur la survie, la dignité et le combat pour rester enracinés dans la terre de leurs ancêtres.

Source : Safa News